dimanche 30 janvier 2011

La mort aux Trousses à l'Institut Lumière

Bonjour à tous,

Après une une remarquable rétrospective Hitchcock en mars 2011, l'Institut Lumière propose de revenir sur le génial réalisateur anglais sur quelques uns de ses films (le programme sur le lien suivant: http://www.institut-lumiere.org/)
A partir du 12 septembre 2014 sera projeté La mort aux trousses réalisé en 1959. Dans ce film longtemps sous estimé car a priori plus léger, Hitchcock nous gratifie de séquences parmi les plus mémorables du cinéma et semble faire étalage de toute sa palette de cinéaste.
L'histoire est assez classique pour Hitchcock: un homme, Roger Thornill (interprété par Cary Grant, une nouvelle fois dans un film du maître du suspens) est pris pour un espion américain du nom de George Kaplan par les hommes d'un businessman trafiquant manifestement avec des puissances ennemies. Moins que l'intrigue, c'est la quête de Thornill/Grant à prouver son identité en démasquant Kaplan qui intéresse le spectateur.
Pour les extra-terrestres qui n'auraient pas vu le film ou qui ne s'en souviendraient plus, je ne dévoilerai rien des différents rebondissements. Mais je reviendrai sur deux séquences du film qui montrent que le cinéma, c'est avant tout savoir se servir de l'image.


Bande annonce:


Thornhill a rendez-vous avec Kaplan en pleine zone agricole! Scène de suspens mythique
L'espion attendrait donc Cary Grant (Thornill) sur une route au milieu de nulle part, se trouvant entre des champs de maïs, à un arrêt de bus. Dans cette séquence magistrale, Hitchcock rassure le spectateur. Rien ne peut arriver à son héros car contrairement aux scènes traditionnelles de suspens ou d'horreur, l'action se passe en plein jour, dans un espace ouvert (open fields des grandes plaines américaines), sans musique. Tous les éléments en présence sont présentés: Cary Grant, un passager attendant son bus, les champs et un avion saupoudrant les récoltes de pesticides. Nulle part ne peut se cacher un ennemi. L'absence de musique confirme cette absence de risque et de danger. Le lieu est rassurant et est reconnu par tous les spectateurs, même ceux de la ville. Nous sommes dans les grands espaces céréaliers américains et l'avion est un élément connu de ce type de production intensive et fortement mécanisée.
Pourtant, Hitchcock donne un indice au spectateur comme au héros: l'avion saupoudrerait des récoltes qui n'existent pas. Seul un habitant de ces régions peut s'apercevoir de cette bizarrerie. Mais Cary Grant, comme la plupart des spectateurs ne se sont rendus compte de rien. Ainsi, c'est à partir de ce moment que la séquence de suspens peut commencer. L'avion se rapproche de Cary grant et le mitraille. Contrairement aux séquences célèbres comme plus tard Psychose (1960), pas de surprise, pas de musique stridente, pas d'espace confiné. Au contraire, le héros a le temps de voir son adversaire qui est lui confiné dans son avion et dont nous ne pouvons voir le visage.
Le héros se protège comme il peut et trouve refuge, encore un paradoxe, non "vers le dehors" puisqu'il y est déjà, mais dans un espace finalement entravant, presque clos: un champ de maïs le mettant hors de vue de l'avion.
Ainsi, Hitchcock met-il mal à l'aise le spectateur en le rassurant sur ce qu'il voit et en produisant une séquence mille fois pillée depuis, que ce soit au cinéma ou dans des pastiches, notamment publicitaires. Cela prouve aussi qu'il faut se méfier de ce que l'on voit. L'absolue évidence de vérité et de clarté n'est pour autant la preuve de la sécurité ni de la vérité.

Le détournement du mont Rushmore!
Hitchcock a eu cette idée curieuse que de faire parcourir ses héros sur les têtes sculptées sur ce Mont Rushmore. Ces statues représentent quatre présidents américains (Washington, Jefferson, Lincoln et Th. Roosevelt). Or le tournage qui devait se faire initialement sur les vraies sculptures a été contraint de se faire en studio car les autorités refusèrent d'ainsi marcher sur ces pères des Etats-Unis, véritable sacrilège!
Pourtant, Hitchcock ne fait-il autre chose que de louer les Etats-Unis dans ces séquences mettant en scène ces quatre présidents sculptés?
En effet, ceux-ci apparaissent dans un premier temps comme spectateurs de différentes séquences qui permettent au héros de pouvoir un peu mieux comprendre ce qui se passe et se sortir, en quelque sorte, des griffes de ses ennemis (je ménage vraiment les spectateurs n'ayant pas vu le film!). Mais progressivement, ces bustes de granit deviennent de plus en plus grand à l'image. Finalement poursuivi par ses ennemis, Cary Grant court sur les têtes, glisse le long des visages qui sont alors filmés dans leur ensemble. Dès lors, seuls les présidents sont montrés aux spectateurs. Ils deviennent des personnages à part entière du film, ceux qui pourront sauver Grant/Thornill de ceux qui veulent le tuer.
Par cette mise en scène, ces plans sur Washington et autres, Hitchcock transforme des éléments immobiles du décor en acteurs de cette dernière course poursuite prenant fait et cause pour celui qui représente de fait le bon Américain, sachant se sacrifier pour la bonne cause.

Deux séquences parmi de très nombreuses tout aussi intéressantes dans un film dans lequel le spectateur est d'emblée saisi dans une course poursuite incessante, celui traquant étant aussi traqué et bien plus encore! Mêlant humour, suspens, scène de séduction et autres tics chers à Hitchcock (qui apparaît encore une fois!), ce film est devenu un standard du cinéma mondial. A ne pas rater donc, et en VO si possible (la VF étant assuré par Michel Roux, cela casse un peu le sex appeal de Cary Grant!).

Réservations au 04 78 78 1895
ou par internet: www.institut-lumiere.org

A bientôt
Lionel Lacour

2 commentaires:

  1. J'aime beaucoup ce film et même si je ne connais pas les basiques du cinéma j'ai eu la chance de connaitre celui la ouf je ne suis pas un extraterrestre ! :o ;)

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    1. Bonjour,
      nous avons tous des films que nous devrions avoir vu et que nous ne connaissons malheureusement pas! J'en ai pour ma part des tonnes!

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