Affichage des articles dont le libellé est Hollywood. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Hollywood. Afficher tous les articles

samedi 6 octobre 2012

Mardi spécial Konchalovsky au Festival Lumière

Bonjour à tous,

Le festival Lumière offre des moments uniques pour tous les cinéphiles.
Le cinéma russe n'a jamais cessé d'exister, malgré la disparition des grands cinéastes du cinéma soviétique.

Andrei Konchalovsky fait partie de ces cinéastes qui ont régulièrement fait l'état des lieux de leur pays.

L'occasion est donc exceptionnelle de pouvoir l'écouter parler de son métier, de son cinéma, de sa manière d'évoquer la société russe puis de voir un de ses films en sa présence à l'occasion du festival Lumière, le mardi 16 octobre, à la Villa Lumière d'abord, au Comoedia ensuite (voir document ci-joint).

A très bientôt

Lionel Lacour

vendredi 28 septembre 2012

Master Class au Festival Lumière 2012

Bonjour à tous,


Le Festival Lumière qui ouvrira le 15 octobre propose outre une sélection de films très large une programmation de documentaires et de master class à la Villa Lumière durant toute la durée du Festival.

Dans une salle aux conditions acoustiques refaite à neuf pour le plus grand des conforts des spectateurs, les festivaliers pourront  profiter du Village situé entre la Villa Lumière et la salle du Hangar, aller voir un film dans la grande salle puis aller voir un documentaire sur l'Histoire du cinéma ou assister à une Master Class prestigieuse.

Les master class sont l'occasion de discuter avec des professionnels du cinéma de tous les domaines de la production: agent, producteurs, techniciens, réalisateurs, acteurs.




Le programme proposé cette année s'est donc particulièrement enrichi avec notamment:

- le 16 octobre à 17h: Master Class exceptionnelle du réalisateur russe Andrei KONCHALOVSKY

- le 17 octobre à 11h: rencontre avec François SAMUELSON, agent d'artistes

- encore le 17 octobre: une table ronde sur "Vittorio De Sica: réalisateur et acteur"

- toujours le 17 octobre, à 18h30: une Master Class exceptionnelle de Jacqueline BISSET

- le jeudi 18 octobre à 11h: rencontre autour de la restauration du film L'assassin habite au 21 en présence des représentants de Gaumont et des studios éclair.

- toujours le 18 octobre à 16h30: une Master Class de la comédienne Clotilde COURAU

- enfin, le vendredi 19 octobre à 11h30: ne manquez pas "La nuit du chasseur, l'histoire d'une édition", une table ronde autour de ce film mythique.

- et à 16h30: la conférence de Pascal MERIGEAU sur le réalisateur Jean RENOIR!


Une occasion pour les festivaliers de découvrir le cinéma par d'autres facettes que les films et échanger avec ceux qui le font naître, vivre et revivre.


Vous pouvez dès à présent retenir vos place en contactant les lieux ou numéros suivants:
- Hangar du Premier-Film - rue du Premier-Film - Lyon 8e, (du mardi au dimanche de 12h à 18h30)
Village du festival (parc de l’Institut Lumière), rue du Premier-Film
(tous les jours à partir du 13 octobre, de 10h30 à 21h)
- Par téléphone au 04 78 76 77 78 (du mardi au dimanche de 12h à 18h30).

Vous pouvez également consulter le programme pour les documentaires proposés ainsi que l'intégralité des films projetés pendant le festival. Toute la programmation se trouve sur le site du Festival Lumière:

A très bientôt au Festival Lumière

Lionel Lacour



mardi 25 septembre 2012

Bientôt le Festival Lumière!


Bonjour à tous,

Le festival Lumière invite ses spectateurs à découvrir les nouvelles de dernière minute, les invités confirmés ainsi que les séances à ne pas manquer… 
Présentations avec extraits de films, suivies d’un verre avec l’équipe !

> Mercredi 3 octobre à 19h et 20h30
> Mardi 9 octobre à 19h et 20h30

Entrée libre sur inscription au 04 78 78 18 85 / communication2@institut-lumiere.org

Suivez l’actualité du festival Lumière 2012 sur www.festival-lumiere.org , Facebook et Twitter.

Et n'oubliez pas le film de clôture le dimanche 21 octobre à la Halle Tony Garnier où sera programmé La porte du Paradis en copie restaurée, en présence d'Isabelle Huppert. 3H36 de l'oeuvre magistrale de Michael Cimino!

A bientôt
Lionel Lacour

mercredi 12 septembre 2012

Bus stop: comédie romantique ou film témoin du machisme américain?

Bonjour à tous,

en 1956, Joshua Logan réalisait son 4ème film avec Marilyn Monroe en tête d'affiche, sans aucun grand acteur ou autre actrice majeure pour lui donner la réplique: Bus stop. Tourné en cinémascope et couleur, Marilyn imposait pour la première fois un rôle qui à la fois ressemblait à celui qu'elle avait déjà joué, une jeune femme pas très futée rêvant d'une vie meilleure avec une certaine assurance néanmoins, et en même temps un personnage qui la présente davantage comme une victime, un être fragile dont le rêve semble bien inaccessible. Et les premières séquences qui la présentent ne font qu'installer d'emblée ce personnages pour les spectateurs dans ces caractéristiques: une jeune femme certes jolie dont tout le monde se fiche ou presque et qui semble perdue dans ce monde quasi exclusivement masculin. Tout le monde, sauf Bo, un jeune cow-boy venu à Phoenix pour un concours de rodéo et accessoirement, en quête d'un ange et de son premier amour. Ce sera bien sûr Marilyn, alias CHÉRIE, qui sera celle qu'il veut ramener dans son ranch du Montana. Qu'elle le veuille ou non!


1. Un film témoin du mythe américain
D'emblée, l'histoire nous projette dans des représentations classiques du modèle américain: deux cow-boys, fiers de l'être, vêtus de jeans et portant une selle, voyagent dans un bus pour rejoindre Phoenix au départ du Montana, avec des arrêts prévus pour se restaurer et se reposer comme autrefois dans les westerns quand les diligences faisaient office de bus sillonnant les différents États de l'Union.
A Phoenix, les deux cow-boys, Bo et Virgile, rencontrent Chérie. Elle ressemble assez au personnage que Marilyn Monroe interprétait dans La rivière sans retour d'Otto Preminger. Mais elle est plus fragile. Et surtout, elle rêve du rêve américain. Comme elle le montre à son amie dans le saloon, elle vient de la campagne, plutôt à l'Est des USA et elle s'est tracée sur la carte le trajet qu'elle a déjà effectué, indiquant au rouge à lèvre chaque endroit où elle s'est arrêtée avant d'atteindre son but ultime: Hollywood! Le mythe de la conquête de l'Ouest perdure, et l'eldorado n'est plus la Californie et ses mines d'or mais la Californie pour briller soit même et devenir célèbre... et donc riche.
Ce mythe de la conquête d'un territoire pour s'accomplir est constitutif d'un pays jeune. Or ce pays a besoin aussi de repères pour que cette population se sente pleinement solidaire. La parade dans Phoenix correspond à ces moments dans lesquels la population américaine sait se fédérer et se retrouver derrière ce qui constitue une culture commune des USA. Les épreuves de rodéo ne sont pas seulement des épreuves physiques d'éleveurs en manque de sensations. C'est aussi un rappel à la population du comment le territoire a été conquis, par des paysans et des éleveurs, qui ont bâtis des villes et qui ont ensuite prospéré. La série Dallas ne disait rien d'autre que cela comme dans les années 1950 le film Géant de George Stevens: des éleveurs de bétail qui se sont enrichis ensuite en exploitant le pétrole et en développant une industrie moderne.
Bus stop est donc une image du temps présent (celui de 1956) avec sa modernité (bus, appareil photo...) mais dans laquelle l'origine même des USA se retrouve à chaque séquence: relais pour les bus, rodéo, chanteuse de saloon... comme dans les westerns!

2. Une remise en cause du modèle du héros américain
Dès que le spectateur voit Bo, il comprend que ce personnage vit à une autre époque. Il a 21 ans, c'est un cow boy qui n'a aucune éducation et surtout, il pense que le monde lui appartient et que tout est possible s'il suffit de le vouloir. En réalité, ce personnage est caractérisé comme n'importe quel héros américain de western. C'est un homme de la terre, il est costaud, sait excellemment faire du cheval, il aime et sait se faire respecter, il sait ce qu'il veut et décide et impose ses décisions. Comme tous les héros de western, il est remarquable... à tous les sens du terme.
Car ce qui marque aussi le spectateur, c'est que toutes ces qualités sont présentées à l'excès, et l'interprétation de Don Murray n'est pas en cause, bien au contraire. Son comportement est en déphasage complet avec celui des autres personnages et avec celui de la foule. Paradoxalement, il est en dehors de son temps. Bo évolue dans un monde qui ressemble dans ses valeurs et ses repères à celui des conquérants de l'Ouest, sauf que la population ne vit plus ainsi. Pour le scénario, une explication est donnée puisqu'il vit dans un ranch du Montana dans lequel il n'a jamais côtoyé de filles. Il a donc évolué selon des principes du XIXème siècle et seul Virgile semble comprendre, bien que plus âgé, le "nouveau monde" que sont les USA de 1956. Ce Jiminy Cricket se transforme en à la fois le traducteur des pensées de Bo, son modérateur mais aussi une sorte de soupape pour le spectateur qui est rapidement, et sciemment agacé par le personnage de Bo. De drôle et pittoresque, il devient rapidement lourd puis gênant voire oppressant.

Bo vient de tomber amoureux de Chérie... son premier baiser!
Son attitude avec les femmes marque évidemment ce qui provoque chez le spectateur le plus de rejet. Parce qu'il a embrassé une fois Chérie, il en déduit qu'ils sont fiancés et prévoit le mariage pour le lendemain, sans même avoir demandé son avis à Chérie, considérée finalement comme une vraie tête de bétail. Or elle se refuse à lui plusieurs fois sans qu'il ne daigne l'écouter. Avec cette phrase résumant ce qu'il est: "les femmes sont vraiment différentes des hommes" , tout son comportement fait de lui non un héros, bien que doté de tout ce qui fait habituellement un héros, mais un lourdaud de plus en plus désagréable, le point d'orgue étant la prise au lasso de Chérie tentant encore une fois de s'échapper de Bo.


Bo vient réveiller Chérie dans sa chambre pour l'épouser.
Ils ne se connaissent que depuis quelques heures!
3. Un message ambigu sur la place de la femme
Une grande partie du film ressemble davantage à du harcèlement qu'à une comédie romantique traditionnelle. Comme cela a été dit plus haut, le comportement de Bo devient de plus en plus oppressant et l'humour qui s'égraine tout le long du film arrive finalement de moins en moins à faire sourire tant Bo apparaît comme une sorte de tyran. La morale du film est alors assez stupéfiante puisque, après l'avoir tant rejeté, Chérie tombe finalement amoureuse de Bo et le suit dans son ranch du Montana. Elle rejoint ainsi un homme qui l'a harcelé et surtout, elle abandonne son rêve et son ambition d'aller se faire un nom à Hollywood. Même si le personnage de Bo a changé à la fin du film, justifiant le revirement de Chérie, la morale du film justifierait alors presque son attitude de macho puisque c'est bien son acharnement à la conquérir physiquement qui lui a permis finalement de la conquérir sentimentalement.
Si la morale est apparemment conventionnelle avec une sorte de "happy end" flattant l'acharnement de Bo, il faut se remettre en 1956 pour réaliser que cette morale implique que les temps changeaient. Ce n'est plus l'homme qui a décidé puisque c'est Chérie qui a choisi alors même qu'elle aurait pu partir et le quitter définitivement. Durant tout le film, elle a fui le modèle classique du héros américain, rustre et non civilisé. Quand tous les spectateurs ne rêvent que de le gifler, il faut attendre le climax du film qui se situe presque à la fin pour que leur rêve devienne réalité, par l'intervention du chauffeur de bus. En effet, alors que le bus qui ramène Bo au Montana avec sa prisonnière Chérie, celui-la est obligé de s'arrêter chez Grace, un restaurant relai, à cause de chutes importantes de neige. Chérie tente encore de s'échapper mais Bo la saisit brutalement et ne comprend toujours pas le refus de sa "fiancée". C'est alors que le chauffeur de bus le prie de laisser Chérie et lui administre une correction monumentale, avec l'assentiment d'ailleurs de Virgile!
Cette séquence en dit long sur les temps qui changent. Le chauffeur de bus avait été caractérisé dans le scénario comme un ancien champion de lutte. Plusieurs fois, les spectateurs l'ont vu faire des avances à Grace sans toutefois la brusquer. Défiant le code Hays, il fait de nombreuses allusions à Grace pour avoir une aventure sexuelle dans sa chambre. Or c'est bien elle qui décide et non lui qui la force. Il correspond donc au héros américain moderne: un homme fort mais éduqué, civilisé et qui respecte les femmes. C'est ce héros moderne qui éduque finalement "à l'ancienne" le jeune Bo. Il n'est plus le héros des films des années 1950. En quelque sorte, il préfigure le personnage de James Stewart dans le film de John Ford de 1962, L'homme qui tua Liberty Valance.
Humilié et ramené à la simple condition d'homme et non de héros, Bo doit s'excuser auprès de tous, notamment des femmes, qui l'excuse assez facilement puisque pour la première fois, il fait preuve d'humilité.
C'est parce qu'il se livre émotionnellement à Chérie que celle-ci découvre une autre personne qui était finalement victime de son éducation, ou plutôt de sa non éducation.
Les temps changent. L'héroïne si pure des films classiques, comme par exemple Grace Kelly dans tous ses films, amoureuse d'un seul homme, n'est que le revers de la pièce qui présentait sur sa face le héros masculin fort et qui avait déjà eu tant d'aventures avec les femmes. Bus stop présente l'exact inverse. C'est Bo qui est pur puisqu'il n'avait jamais embrassé de femmes avant Chérie. Et c'est elle qui a connu des aventures avec de nombreux hommes et qui finalement succombe à l'amour.
Et l'impression finale de la voir renoncer à son rêve prend davantage de sens. Dans les films classiques, ce sont les hommes qui voyagent et qui rencontrent une femme qui les "fixe" pour qu'ils deviennent non des héros errants mais des sédentaires qui s'accompliront dans une vie de famille. Les westerns sont des modèles quasi inépuisables de ce genre d'histoire. Or dans Bus stop, c'est Chérie qui est la nomade et c'est l'homme, Bo, qui est le sédentaire et qui va fixer Chérie.

Marilyn - Chérie: une femme fragile 
Conclusion
Bus stop a donc marqué un tournant dans la carrière de Marilyn Monroe. Seule véritable vedette d'un film comme pouvait l'être un acteur masculin à Hollywood, impliquée dans la production du film, celui-ci semble se conclure par une fin très conventionnelle faisant de l'homme le vainqueur. Or la morale est bien plus complexe. Ce n'est plus le même homme qui gagne le coeur de Marilyn, même si pour la chute du film, il semble se comporter avec Virgile comme il s'était comporté avec Chérie, c'est-à-dire de manière possessive. C'est bien elle qui finalement décide de son destin. Sous son aspect très fragile grâce à un maquillage la rendant quasiment diaphane, elle manifeste une force et une volonté que la conclusion du film simule de lui ôter. Mais les temps sont vraiment en train de changer, à Hollywood comme ailleurs. Ce n'est pas encore la pleine émancipation de la femme mais Bus stop a participé à sa manière à témoigné de l'évolution en marche de la société américaine tout en feignant encore de laisser gagner le héros masculin en lui permettant de construire une famille selon le modèle américain classique... une victoire à la Pyrrhus.

A bientôt
Lionel Lacour

samedi 5 mai 2012

Le Forum des images - Mai 2012

Bonjour à tous,

une fois n'est pas coutume, je vous propose de découvrir une programmation à laquelle je ne participe pas, ni de près ni de loin mais qui mérite le détour.
Le forum des images est en effet organisé à Paris depuis bien longtemps déjà et offre au public une approche cinématographique variée faisant du film une clé de compréhension du monde dans lequel nous vivons.
J'insisterai surtout sur la programmation intitulée "Paris vu par Hollywood" dont l'intérêt évident est de voir comment les Américains se représentent une ville chargée de symboles historiques, ville dont les grands moments historiques ont souvent abouti à des messages que certains, à tort ou à raison, ont prétendu être universels.

Je vous laisse découvrir tout le programme sur le site du forum des images et vous invite à découvrir ces moments forts, notamment avec Denis Podalydes dans une master class ou avec l'historien du cinéma Antoine de Baecque.

Très bon Forum des images à Paris et à très bientôt.

Lionel Lacour

mardi 20 septembre 2011

Casablanca: un accueil en France étonnant!

Bonjour à tous,

Casablanca fait partie de ces films qui ont marqué des générations de spectateurs et de cinéphiles. Certains continuent même, consciemment ou pas, à propager une réplique célèbre, le fameux "Play it again Sam" quand la vraie réplique prononcée par Ingrid Bergman est "Play it once, Sam, for old time sake".
Il ne viendrait plus à l'idée de quiconque de critiquer négativement ce film de Michael Curtiz de 1942. Mieux, les spécialistes trouvent dans les défauts du film ce qui fait sa beauté et sa postérité. Michel Pérez titrait même en septembre 1987 dans L'obs de Paris quil était "le plus beau des mauvais films", expression qui lui était collée depuis plusieurs années déjà.
Pourtant, ce film ne reçut pas un accueil unanime à sa sortie selon les pays!

BANDE ANNONCE:



mercredi 31 août 2011

Cowboys et envahisseurs: un film 100% US?

Bonjour à tous,

Voici le genre de film dont on se méfie d'emblée. Le titre d'abord. Même le titre original, Cowboys & aliens ne laisse planer aucun doute sur l'ambition du projet: faire cohabiter deux genres du cinéma que les Américains ont usé jusqu'à la corde, en particulier le premier.
À y regarder de plus près, c'est-à-dire en voyant le film, on se rend compte que l'entreprise est sinon d'une grande qualité, l'histoire et l'intrigue seront à juger par les spectateurs eux-mêmes, du moins plus intéressante qu'il n'y pouvait paraître. À commencer par le fait qu'il faut bien admettre que si les extra-terrestres existent et qu'ils sont plus en avance technologiquement que nous, ils ont pu arriver à une autre époque que la nôtre. Et pourquoi pas au XIXème siècle? Mais forcément aux Etats-Unis!



Bande annonce:

1. Du cinéma culture TV
Le spectateur plonge dans le film qui commence comme une introduction de série télé. Un mystère sur un personnage étrange, ignorant qui il est et ce qu'il fait là, en pleine zone semi-désertique. C'est tout-à-fait le genre de situation dont se délectent les séries policières, que ce soit Les experts ou N.C.I.S. ou bien d'autres encore. Le début de Lost présentait lui aussi le personnage principal de la série seul, perdu dans une forêt, ne comprenant pas ce qu'il y faisait, pas plus que le spectateur d'ailleurs!
Même le générique créditant les techniciens et acteurs secondaires se déroule à l'écran alors même que l'action du film a déjà commencé. Comme à la télévision donc!
Sauf que la réalisation ne se limite pas à des plans serrés ou centrés sur les protagonistes. Au contraire, des plans classiques de western mettent justement le genre choisi en valeur. De même, les parties concernant les aliens renvoie inévitablement au cinéma et non à la télévision. Ce mélange des genres vise incontestablement à séduire tous les publics. Les plus jeunes qui seront ravis de retrouver certains codes de leur culture audio-visuelle. Les plus anciens nostalgiques du western d'antan ou heureux de retrouver des "bêbêtes" extra-terrestres dangereuses.

Même le casting semble répondre à cet objectif en rassemblant Harrison Ford, Indiana Jones ou trublion de la première trilogie Star Wars et Daniel Craig, version moderne de James Bond. Sans oublier, série télévisée oblige, la présence d'Olivia Wilde, la célèbre n°13 de la série Docteur House.
Avec ce patchwork, John Favreau, réalisateur des deux Iron man, réussit donc à toucher tous les publics américains.. ou presque (nous le verrons plus tard). Et il n'est pas étonnant que ce réalisateur aille d'ailleurs dans ce sens, lui qui est justement un parfait produit de cet univers audiovisuel, passant de la télévision au cinéma en tant qu'acteur ou réalisateur, dans une période où la télévision semble se renouveler davantage que le cinéma. John Favreau fut, entre autre, acteur dans Friends mais aussi dans Dare devil au cinéma. Il fut la voix de nombreux personnages d'animation. Il réalisa quelques téléfilms. Ses scénaristes viennent aussi de la télévision. Parmi eux, ils sont sept au total! se trouvent Roberto Orci et Alex Kurtzman qui furent notamment scénaristes pour Alias, Hawaï 5-0 et de Fringe. Damon Lindelof écrivit lui pour Lost. Mark Fergus et Hawk Ostby sont eux des scénaristes n'ayant travaillé que pour le cinéma et notamment pour Iron man.
Cowboys et envahisseurs correspond donc bien à un produit de synthèse entre deux cultures de plus en plus complémentaires aux Etats-Unis, à savoir la culture cinéma et celle des séries télévisées.

2. Un film qui explique la puissance américaine
L'autre aspect intéressant du film relève du message qu'il porte du début jusqu'à la fin. L'action sera portée par un individu, Daniel Craig, dont on apprend au fur et à mesure, et avec lui, que sa vie n'a pas toujours été du bon côté de la loi, est bien celui qui nous guidera dans l'intrigue. La première personne qu'il rencontre est un pasteur qui se rendant compte de l'amnésie du personnage lui dit que peu importe ce qu'il a fait dans son passé, ce qui compte est ce qu'il fait désormais. Ainsi, l'idée de la rédemption est immédiatement posée et renouvelée tout le film pour lui mais aussi pour d'autres personnages, et par tous les moyens possibles! Olivia Wilde connaîtra une résurrection étonnante, Harrison Ford sera en quelque sorte racheté et même son fils sera étonnamment sauvé de sa bêtise!

Avant d'en arriver là, il aura fallu que les Etats-Unis, et ici une bourgade typique du western avec son saloon, son pasteur, son shérif et son grand éleveur, soit attaqué par surprise et de manière incompréhensible par des ennemis inconnus. Une attaque à la Pearl Harbor, venant du ciel! La situation méritait donc un rassemblement des forces vives.

Pour en revenir au personnage de Daniel Craig, dont on apprend qu'il s'appelle en fait Jack Lonergan, c'est lui qui va réussir à rassembler tous les humains pour combattre les aliens en agissant pour le bien, notamment en sauvant Ella (Olivia Wilde). Jack, personnage fédérateur, porte d'ailleurs le même prénom que le héros de Lost (Jack Sheppard) avec qui plus est, la même fonction: rassembler les survivants contre un ennemi commun et longtemps insaisissable! Mais le plus étonnant, c'est bien de voir se rassembler derrière la même bannière (étoilée?) ceux qui autrefois s'affrontaient: blancs et indiens, citoyens honnêtes et hors la loi, hommes et femmes, adultes et enfants. Ce rassemblement aboutit à un sacrifice pour sauver les innocents captifs des créatures. Quand ils sont retrouvés dans le vaisseau des aliens, les spectateurs les découvrent déshumanisés et enchaînés, ayant perdu toute identité et finalement tout libre-arbitre. Certains ont subi des expériences scientifiques, dont la femme de Jack, sans aucun intérêt mais conduisant à leur mort. Ella ne rappelle-t-elle pas que pour les créatures, les humains ne sont que des insectes? John Favreau et ses scénaristes nous présentent donc des ennemis qui ressemblent furieusement à un ennemi totalitaire comme pouvaient l'être les nazis ou les communistes staliniens, capable de cruauté invraisemblable et de soif de vengeance.

On retrouve aussi toute la propagande classique des Etats-Unis qui diabolise l'ennemi en le montrant comme un monstre, souvent sur-armé, et si possible avec des armes surpuissantes, comme cela a été fait notamment pour convaincre, avec plus ou moins de succès, les alliés de l'OTAN à intervenir en Irak en 2003. L'ennemi des Américains est forcément un monstre puissant à combattre sans aucune pitié car c'est la liberté individuelle des hommes et des femmes qui est en jeu.

Les "bêbêtes" sont vaincues et à leur tour exterminées. Et les héros peuvent récupérer ce qu'elles étaient venues prendre: les leurs et l'or. C'est bien cet or qui était convoité par les aliens. C'est cet or qui va enrichir le bourg désormais en paix et dans lequel les relations tendues entre le grand propriétaire et ancien colonel Woodrow Dolarhyde  (alias Harrison Ford) et le reste des habitants sont désormais fondées sur le respect et non sur le rapport de force. Les réflexions entre Woodrow et le shérif renvoie encore à la situation de l'après seconde guerre mondiale: un pays riche d'or et dans lequel l'activité économique va repartir de plus belle. A l'écran, tout se reconstruit d'ailleurs et les habitants s'agitent étonnamment.  Seul Jack semble avoir tout perdu. Sa femme est morte, tuée par les aliens, et celle qu'il aimait depuis est morte aussi. Mais comme une boucle, le film se clôt sur une remarque et deux images. Woodrow lui dit que Ella vit désormais dans un meilleur monde, le tout en contre plongée dans laquelle domine le clocher d'une église. L'image peut alors, avant le départ de Jack, montrer le drapeau américain, forcément...

3. Un film politiquement correct?
Les Américains ont triomphé car ils ont su s'unir et se comprendre. Pourtant, deux communautés manquent singulièrement à l'image: aucun asiatique mais surtout aucun noir. En ces temps de représentation quasiment obligée des communautés à l'écran, on peut en effet s'étonner qu'aucun noir n'ait un quelconque rôle. En ce sens, le film s'inscrit dans la représentation classique des westerns puisque rares sont ceux qui ont pour personnage un noir, sauf à les représenter comme esclave ou esclave en fuite ou toute autre représentation de dominé. John Ford dans Le sergent noir en 1961 avait montré la présence des noirs dans les corps d'armée nordiste. Sergio Leone avait employé Woody Strode, le même acteur qui jouait dans Le sergent noir pour un petit rôle dans Il était une fois dans l'ouest.

 Depuis, des personnages noirs ont régulièrement intégré les castings des western, que ce soit dans Impitoyable avec Morgan Freeman ou surtout dans Les mystères de l'Ouest avec Will Smith dans le rôle principal de James West.
Le choix de ne pas mettre d'acteur noir dans ce film alors même que la victoire contre les aliens passe par la réunion de toutes les communautés existantes est particulièrement osé. On peut interpréter ce choix de bien des manières. On peut aussi donner le crédit de ne pas avoir voulu "surcharger" le message du film. Mais cela reste surprenant surtout quand on lit ce qui est marqué en fin de générique.
En effet, comme chaque fois qu'un film utilise des animaux, il est fait mention qu'aucun d'eux n'a été violenté ou blessé pendant le tournage. Les amis des bêtes sont d'ailleurs très vigilants sur ce point, d'autant que certaines séquences pourraient laisser penser que les chevaux auraient pu en effet se blesser!
Plus drôle est cette mention sur l'usage du tabac. Chose curieuse pour un film contemporain, on voit des personnages fumer le cigarillo et Jack se roule même une cigarette! Alors, à la fin du film, il est signalé que la consommation de tabac dans le film se fait dans une perspective artistique et n'est bien entendu nullement une promotion de l'usage du tabac. On voit bien ici la puissance des lobbies anti-tabac qui arrivent à faire écrire cela sur un générique de film! En revanche, rien n'avertit les spectateur que l'usage d'armes à feu est dangereux et qu'il ne s'agit que d'une fiction. Pourtant, son usage est au moins aussi dangereux et plus radical que la consommation de tabac. Et pour n'en rester qu'à la consommation, Jack peut boire autant de whisky qu'il le veut sans qu'une mention ne prévienne de l'alcoolisme sur le générique!


Conclusion
Cowboys et envahisseurs est donc un film grand public qui joue sur tous les registres et s'adresse à tous les publics. Sur bien des points, il répond à la présentation classique des Américains: l'individu au service de la communauté, la cohésion des communautés fait la puissance et la richesse des Etats-Unis, la rédemption est toujours possible si on choisit de faire le bien. Pour mettre en scène ces idées, le film doit se protéger de certains lobbies comme celui de la protection des animaux ou celui luttant contre la consommation de tabac. On peut imaginer que l'absence d'acteurs noirs relève d'une volonté de liberté qui existe encore dans le cadre d'un casting ou de l'écriture de scénarios. Mais surtout, peut-être que pour magnifier les valeurs américaines, les scénaristes ont voulu se repencher sur les deux communautés fondatrices du mythe du western, les cowboys et les indiens, pour montrer que le salut américain passe justement par une entente entre les communautés américaines. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé aussi durant la seconde guerre mondiale. Et les indiens ont aussi combattu contre l'ennemi nippon comme le montrait déjà Clint Eastwood dans Mémoires de nos pères en 2006, avec Adam Beach dans le rôle de l'indien combattant à Iwo Jima. Or c'est ce même Adam Beach qui joue le rôle de l'indien dans Cow boys et envahisseurs et qui combattra pour plaire au plus américain du film: Woodrow - Harrison Ford. Un message plus proche d'Obama finalement que des faucons républicains. A ceci près que comme après la seconde guerre mondiale, le point de vue final ne mêle pas les Blancs aux Indiens mais présente assurément la victoire des Blancs...


A bientôt

Lionel Lacour

jeudi 18 août 2011

La planète des singes 2011: le mythe régénéré!


Bonjour à tous,

avant la sortie du film La planète des singes: les origines, j'avais proposé le 8 août une petite analyse comparée entre les trois version de cette donc fameuse "Planète des singes" (voir article Le retour de La planète des singes) N'ayant pas vu alors le film de Rupert Wyatt, j'osais espérer qu'elle ne pourrait être que plus convaincante que celle de Tim Burton. Et compte tenu de l'angle d'approche, novatrice par rapport au livre de Pierre Boulle mais aussi par rapport à la première version cinématographique, j'imaginais que, si le film était réussi, une suite serait envissageable.

Après avoir vu le film, je peux dire que ma surprise a été grande et que je suis sorti de la salle plutôt enthousiasmé du spectacle que j'avais pu voir.


voir aussi
Le retour de La planète des singes?
et
La planète des singes: l'affrontement


1. Un blockbuster?
Comme le dit la critique de Télérama, ce film est un "faux" blockbuster. Que pouvait-elle entendre par là? Tout simplement que tous les ingrédients sont présents pour faire du film une autre production américaine à la Emmerich: des effets spéciaux dans tous les sens, des scènes d'action spectaculaires, des mouvements de caméra virevoltants... Oui, tout est bien présent. Sauf que Ruppert Wyatt aurait pu comme d'autres tomber dans la mode du cinéma en relief. Quand on regarde le film, on imagine combien d'autres réalisateurs se seraient vautrés dans l'utilisation abusive de ces scènes de surgissements, de gorilles hurlant face caméra, d'hélicoptères fonçant sur l'écran ou encore de scènes aériennes au sommet des séquoias ou du Golden Gate.
Or rien de cela. Non, Ruppert Wyatt a su garder la magie du cinéma, en deux dimensions, parce que lui, peut-être à la différence de bien d'autres, a su mettre en scène un scénario qui était autre chose qu'une histoire spectaculaire. Pour cela, il faut reconnaître aux deux scénaristes Rick Jaffa et Amanda Silver une vraie intelligence tant dans le récit que dans l'interprétation qu'ils ont faite de l'oeuvre. En réalité, si le livre de Pierre Boulle est crédité, c'est plutôt vers la version de F.J. Schaffner qu'il faudrait plutôt trouvé une réinterprétation. Et Ruppert Wyatt, en montrant des images de Charlton Heston dans la version originale de La planète des singes passant à la télévision, ne s'est pas caché dans la référence qui l'a inspiré.  En effet, l'intelligence de la version de 1968 avait été de garder tout du livre, à l'exception du chapitre introductif et des deux autres de conclusion, pour finir sur une scène d'anthologie: la planète des singes révélant son secret par la vision apocalyptique de la statue de la Liberté ensablée.


La version de Schaffner introduisait dans son film l'angoisse majeure de l'époque, celle d'un nucléaire pouvant éliminer la civilisation humaine. La version 2011 s'est affranchie du livre en racontant l'histoire à l'endroit, ce que la saga commencée en 1968 allait expliquer à partir de l'épisode 3 jusqu'au 5 (Les évades de la planètes des singes, La conquête de la planète des singes, La bataille de la planète des singes), mais elle a compris que l'utilisation de l'image d'une planète passant sous contrôle des singes impliquait un discours sur notre civilisation, ses angoisses et ses dangers quand Tim Burton ne faisait que salement une caricature sans âme et sans intérêt de ce qu'était censée être la société humaine. Ruppert Wyatt a quand même introduit des scènes de très grand spectacle plutôt réussies avec l'invasion progressive de San Francisco par les primates jusqu'à la traversée monumentale du Golden Gate. Les amoureux des grandes séquences mouvementées y trouveront leur compte!

Un film de Vincenzo Natali en 2009.
2. Une vraie radiographie du monde contemporain
En 2009 sortait le film Splice avec notamment Adrien Brody. Le scénario est assez proche de celui de La planète des singes: les origines. Deux scientifiques ont créé dans un laboratoire des êtres vivants à partir d'ADN de diverses espèces. Au moment de montrer leur découverte aux investisseurs potentiels du laboratoire, ces deux créatures s'entretuent violemment, mettant fin aux recherches. Sauf que ces deux scientifiques continuent et créent en secret un être vivant avec en plus de l'ADN humain. Cette créature se développe, devient intelligente et doit être sortie du laboratoire et éduquée à l'écart du monde...
Sans raconter la fin, les spectateurs ayant vu la dernière version de la planète des singes y verront quelques similitudes. Outre le déroulé narratif, elles relèvent d'abord de cette angoisse de nos sociétés face aux progrès de la science, et notamment dans la manipulation des gènes. Mais si Splice n'est au mieux qu'une série B avec un dernier acte à la limite du ridicule, le film de Wyatt ne souffre ni de moyens, la motion capture est maîtrisée à la perfection, ni de développement scénaristique permettant d'aller au-delà de la simple intention de Splice.
En effet, le héros, Will Rodman, interprété par James Franco, a une motivation dans sa volonté de développer un sérum biologique à base de virus. S'il le teste sur des chimpanzés, c'est dans un objectif thérapeutique pour les hommes: soigner la maladie d'Alzheimer. Le sérum test s'appelle d'ailleurs ALZ 112. Cette motivation est liée à cette maladie dont souffre son père. Quand la démonstration de la réussite de l'ALZ 112 échoue, Will récupère en secret le petit d'une chimpanzée qui lui a transmis génétiquement le sérum qu'on lui transmettait. S'en suivent alors des séquences d'éducation du jeune chimpanzé.

Incroyable Andy Serkis dans le rôle de César
tenant dans ses bras son "grand-père"
L'intelligence du scénario est dans la manière d'inscrire sans grandes phrases démonstratives une réalité sociale de plus en plus importante pourles spectateurs: la cohabitation de trois générations avec des parents qui vieillissent et dont s'occupent les enfants et des enfants qui doivent être éduqués parfois longtemps. Pour les premiers, ce vieillissement implique de plus en plus une sénilité que la maladie d'Alzheimer accélère et qui traumatise tous ceux qui la vivent en tant qu'accompagnant et qui est redouté par tous. Les noms d'acteurs célèbres étant morts de cette maladie vient rappeler qu'elle touche tout le monde, de Peter Falk en passant par Annie Girardot et même Ronald Reagan.
Ce que le film montre aussi, c'est les liens qui existent entre le monde capitaliste et la science. L'un a besoin de l'autre et réciproquement. Mais si la science est mise en cause dans le film, c'est davantage le monde capitaliste représenté ici par un laboratoire pharmaceutique et biologique qui est le plus criticable. Cela aussi s'inscrit dans les sentiments des populations occidentales comme des pays du Sud. Le film généralise une situation mais qui paraît crédible au regard de certains faits ou de certaines rumeurs. N'a-t-on pas dit que le SIDA était une maladie créée par l'homme, testée sur des singes et transmise ensuite par erreur et par contagion à l'ensemble de la planète? En jouant sur des angoisses primaires et sur des peurs collectives, Wyatt réussit ce que Schaffner avait fait avec l'angoisse du nucléaire.
Ainsi, en mêlant les peurs quotidiennes liées au vieillissement de la population et celles dues à un capitalisme incontrôlable se servant d'une science expérimentale et apprentie sorcière, le film peut ensuite imposer un discours, quitte à ce que certaines facilités scénaristiques existent.


Plongée extrême pour montrer l'état de domination
des primates par les hommes.
Ruppert Wyatt usera de ce même procédé classique
pour illustrer le renversement de situation.
3. Un discours moral
Le film de Ruppert Wyatt et un film de grands sentiments. La haine de la violence, , la générosité, la reconnaissance, le respect de l'autorité et le respect des autres et de soi irriguent le film.
Ainsi écrit, cela peut ressembler à n'importe quel film américain plein de guimauve. L'intérêt du film est que cela passe surtout par les singes et leur comportement, à commencer par celui adopté par Will, César. A noter que le nom César est celui de la première saga et qui soulèvera les singes dans La conquête de la planète des singes.
Le premier grand sentiment qui est évoqué, outre celui de l'employé qui rechigne à tuer les chimpanzés du laboratoire et refuse à tuer le bébé, futur César, est l'amour d'un fils pour son père, atteint donc de la maladie d'Alzheimer. Jamais le fils ne manifeste un quelconque regret de s'occuper de son père mais de la tristesse de voir ce qu'il est devenu, lui l'ancien professeur de piano. C'est cet amour pour son père qui lui fera tester sur lui l'ALZ 112, en dehors de tout protocole et encore plus d'autorisation du laboratoire, pour qu'il guérisse. Ce qui se passe effectivement. Mais cet amour filial passe aussi entre Will et César devient le vrai fils de la famille, apprenant comme un écolier, jouant comme un enfant, s'habillant comme un humain. Cet amour familial passe dans des scènes quotidiennes dont une émouvante où César aide son "grand-père" à tenir ses couverts. Sans mot, juste par le geste, tout l'amour et le respect de l'ancien est illustré dans cette séquence.
D'autres séquences montrent encore le respect de l'autorité comme lorsque César demande gestuellement à Will l'autorisation de grimper à un Séquoia.
Ce qui n'est alors qu'une séquence spectaculaire qui permet à César de voir San Francisco de haut devient ensuite une figure récurrente dans le film. Cette verticalité qui place celui qui détient l'autorité au dessus. Quand le dirigeant du laboratoire arrive dans son entreprise alors occupée par les singes, une contre-plongée extrême le positionne clairement "sous" les singes qui dominent désormais l'espace. Wyatt use souvent de ce type de plan pour resituer les personnages, humains ou simiesques, dans leur hiérarchie. Car le film montre aussi que chacun doit avoir sa place dans une société. Quand César est "emprisonné" avec d'autres primates, il se sent humilié car il se sent finalement plus humain que primate, doute qui l'avait d'ailleurs exprimé de diverses manières dans le film. Sa période d'emprisonnement lui permet de comprendre où est sa place et donne lieu à des séquences de grande intensité, que ce soit entre singes ou entre César et les hommes.
Mais la morale du film porte aussi sur la place de la violence. Celle-ci conduit au désordre et à la rupture de la paix. César en fera l'amère expérience. Alors que son "grand père" est agressé par un voisin ne comprenant pas qu'il souffre d'Alzheimer, César vient le défendre violemment. Ce qui précipite son enfermement. Dans un autre registre, Jacobs, le patron du laboratoire accélère les essais du ALZ 113 car très prometteur en terme de réussite médicale mais surtout de revenus pour son entreprise, alors même qu'il avait justement interrompu les essais de l'ALZ 112. Ce sont les essais non maîtrisés sur l'ALZ 113 qui entraîneront les désastres à venir dans le film. Dans les deux cas, la violence entraîne une rupture d'équilibre. Peu importe qu'elle soit sa forme et son origine. Celle de César était due à l'amour pour le père de Will et s'est manifestée par une explosion physique. Celle de Jacobs était due à l'avidité et s'est manifestés par une débauche non maîtrisée de moyens pour créer l'ALZ 113. Les conséquences sont désastreuses dans les deux cas.
C'est ainsi que César comprend, dans son propre cas, que la violence n'est pas une solution et qu'il empêche chaque fois qu'il le peut, qu'elle se manifeste de manière gratuite et démesurée. C'est ce refus de la violence qui lui fera dire NO contre l'homme qui veut le frapper ou contre les singes qui veulent tuer un homme rendu inoffensif.

Conclusion
Le film a quelques imperfections sans gravité. La possibilité biologique pour qu'un singe parle ne dépend pas de son intelligence. Mais le film est une parabole comme pouvait l'être le livre ou la version de 1968. Certaines réactions peuvent sembler trop exagérées, notamment l'enthousiasme de Jacobs pour l'ALZ 113 alors même qu'il avait stoppé net le développement de l'ALZ 112 sans aucune enquête sur les raisons de sa défaillance. Mais le spectateur acceptera cela sans aucun problème parce que le propos du film est ailleurs. Le tour de force du film de 1968 était sa séquence finale, qui, à sa sortie, était absolument cauchemardesque. En racontant l'histoire dans le bon sens, Wyatt s'évitait une rupture de cohérence temporelle. Mais il s'empêchait aussi un retournement de situation comme en 1968. Et pourtant, les scénaristes et le metteur en scène ont réussi ce tour de force de créer une fin sans effets spéciaux monstrueux, juste par la maîtrise du récit et de l'image à générer une angoisse chez le spectateur qui peut suffire pour un seul épisode mais aussi ouvrir la porte à une suite, ce que j'envisageais déjà le 8 août sans avoir encore vu le film. Mieux, le film laisse sans aucun doute des pistes sur la découverte par d'autres hommes d'une planète conquise désormais dominée par César et d'autres singes. Je ne peux hélas révéler ce dont il s'agit mais elle résonne en nous comme la statue de la Liberté faisant face à Charlton Heston! Avec cette approche supplémentaire: le monde n'est plus divisé en deux camps mais bien en proie à une mondialisation inéluctable. Ce que la version de Tim Burton ne permit jamais tant il s'était perdu dans le temps, l'espace et les idées, celle de Ruppert Wyatt est prometteuse d'une suite qu'on espère au moins d'aussi bonne qualité.

A bientôt
Lionel Lacour

lundi 15 août 2011

Captain America: encore un super héros américain

Bonjour à tous,

En cet été de sortie de blockbusters, je voulais faire un petit point rapide sur la sortie de la prochaine adaptation cinématographique de Captain America: first avenger. Elle semble être la continuité des adaptations des différents super héros de bandes dessinées qui reviennent régulièrement à l'écran aux USA. Comment peut-on expliquer ce retour régulier de ces adaptations à l'écran?

1. Une spécificité américaine

les USA ont ceci de particulier, c'est notamment de se représenter sous des formes allégoriques de super héros dont chacun représente en quelques sorte une des spécificités du pays. Superman, héros surpuissant venant d'une autre planète est le garant des libertés et de la paix contre les ennemis étrangers. Spiderman représente l'Américain banal qui se trouve doté non de pouvoirs au sens propre du terme mais de capacités extra-humaines et qu'il met au service de la justice. Batman est une sorte de héros rooseveltien puisqu'il ne dispose d'aucun super pouvoir mais il met sa fortune au service de la société contre toute forme de dictature et pour le bien de sa cité. Le président démocrate était lui-même un grand bourgeois qui avait rejoint le camp démocrate justement pour défendre la populations contre la crise et ses effets. Batman, né en 1939, ne pouvait être vu que comme un héros démocrate.
Tous les films ou séries qui ont adapté ces héros au cinéma ont en règle générale repris ces caractéristiques principales mais au fil du temps, ils ont cherché à humaniser davantage ces personnages, entrant dans leur psychologie alors même qu'ils n'avaient été créés que pour représenter les USA dans l'image de ce que son peuple se représentait de lui-même.
Né en 1932, Superman apparaît pour la première fois dans un Comics en 1938
avec son slip rouge, comme dans la version de gauche de 1940, disparu dans la version de 2011.
Les explications sur l'origine des pouvoirs de Spiderman ou sur la genèse de Superman étaient apportées a minima puisque ce qui comptait était bien leur mission. On retrouve ainsi derrière une origine quasiment messianique de ces super-héros: ils ont une mission et les USA sont le nouveau Jérusalem!
Mais comme dans la Bible, les super héros ne sont pas toujours appréciés et sont souvent jugés hâtivement dans leurs actions. S'ils ne sauvent pas à temps, ils sont critiqués puisqu'ayant failli à leur mission. Ils trahissent les Américains qui avaient vus en eux leur sauveur. Cette récurrence des désamours entre les populations et les super-héros montrent aussi une des caractéristiques des USA. Ils sont attendus - du moins le pensent-ils - comme des sauveurs mais s'ils échouent, ils sont aussitôt critiqués, calomniés voire reniés. Ce que les spectateurs américains ressentent en voyant chaque épisode de toutes les adaptations filmiques, c'est-à-dire que le héros est injustement méprisé, correspond aussi à ce qu'ils pensent d'eux-même et de leur pays. Les USA sont les super-héros de la planète et les autres les aiment quand ils réussissent leur mission qu'ils se sont parfois auto-attribués!

2. Une comparaison européenne nécessaire
A la différence des USA, il n'y a pas de super-héros français, allemand, italien ou espagnol. Rien que des héros bien charnels, que ce soit Jean Valjean, Sherlock Holmes, Don Quichotte etc. Cette différence s'explique parce que l'Europe, si elle constitue une civilisation, ne constitue en aucun cas une Nation. Ainsi, quand la culture du héros américain a besoin d'un héros, il doit chercher un personnage transcendant des valeurs d'une Nation constituée de différentes communautés. Il ne peut être catholique au risque de s'opposer aux Protestants du pays. Il doit défendre des causes transversales et pas des particularismes. En revanche, la culture européenne offre des héros bien ancrés dans leur culture: le flegme britannique, la capacité de révolte du Français. C'est ensuite que s'opère une possible universalisation des héros et des situations. Il est tout à fait remarquable de voir comment a été adapté le roman de Hugo Les misérables et comment il a été reçu dans les pays anglo-saxons, et particulièrement aux USA! A partir d'une histoire justement tellement contextualisée dans le XIXème siècle bouillonnant français, le discours historique est devenu une simple toile de fond pour transmettre un message universel. Quant à Sherlock Holmes, le personnage so british de Sir Conan Doyle a été adapté maintes et maintes fois à l'écran, se transformant progressivement en un vrai héros digne des Marvels, les dernières versions portées à l'écran le prouvant. Il a même inspiré une des séries les plus remarquables de ce XXIème siècle: Docteur House.

Quant aux héros de la mythologie scandinave et germanique, ils ont bien sûr influencé la culture européenne, mais d'abord comme élément d'identification et d'unification de nations comme celle allemande. Wagner et sa tétralogie n'ont pas incorporé les dieux dans le XIXème siècle.
Ce sont les Américains qui ont utilisé la culture européenne - étant d'origines européennes pour la plupart - pour la transformer parfois en "produits" américains. Thor, le dieu scandinave est devenu un super héros côtoyant certains super-héros comme Iron man ou justement Captain America.






3. Captain America: un héros à part
Né en décembre 1940, ses premières aventures sont publiées en mars 1941 dans Timely Comics, ce personnage n'est pas en soi un super-héros. Steve Rogers, le vrai nom de Captain America, est un Américain typique qui a grandi pendant la grande dépression des années 1930. Quand l'Europe se déchire, il décide de combattre le nazisme. Mais il est chétif. Il accepte alors de tester un sérum qui fera de lui un super-soldat. Son existence provient donc ouvertement d'un engagement pour la défense de valeurs démocratiques et anti-totalitaires. Il est le seul héros qui porte clairement le nom America, même si Superman en portait déjà, les couleurs.
Ainsi, en étant publié en mars 1941, Captain America devient en quelque sorte le premier américain entré ouvertement dans la Seconde Guerre Mondiale. Par ses motivations, il peut être considéré lui aussi comme un héros rooseveltien quand le président qui annonçait la neutralité des USA tout en dénonçant les exactions nazies et en appelant les Américains à choisir leur camp selon leur conscience.
Portant lui aussi les couleurs des USA, Captain America aura une "carrière" mouvementée puisqu'il sera congelé à la fin de la Second Guerre mondiale avant de retrouver la vie dans les années 1960, en plein "dégel" des relations américano-soviétiques.


Affiche de la version 1990


Il sera également adapté plusieurs fois sur le petit comme sur le grand écran. La dernière en date remontait en 1990 et était d'une qualité très médiocre. Elle correspondait de fait à la fin de la guerre froide et l'affirmation de la toute puissance américaine de George Bush face au déclin inexorable de l'URSS. Sorti en décembre 1990 au Royaume Uni, il ne sorti qu'en vidéo aux USA, preuve de la piètre qualité du film, et en 1992 seulement!






Chris Evans, la Torche humaine des Quatre fantastiques
devient Captain America version 2011


Que représente alors cette nouvelle version de Captain America: first avenger?
Ce qui semble évident, c'est bien de voir que, contrairement à la version de 1990, l'histoire se passe au moment ou le héros, Steve Rogers, devient Captain America. Or, en prenant ce point de départ, Captain America est à nouveau présenté comme un Américain décidant finalement de se sacrifier, puisqu'il teste un sérum sans que l'on sache vraiment les conséquences sur le corps humain, mais dans un objectif clair: celui de combattre le totalitarisme et faire valoir les valeurs américaines. Comme il a été dit plus haut, Captain America était un héros rooseveltien, c'est-à-dire démocrate. En reprenant l'histoire à se genèse, les scénaristes et réalisateur (respectivement Christopher Markus et Stephen McFeely pour le scénario, Joe Johnston pour la réalisation) positionne clairement leur personnage dans un retour aux sources, celui de la nécessité de défendre les valeurs américaines faites de liberté et de démocratie. Lu au présent du spectateur de 2011, la transposition entre les motivations de Captain America en 1941 et la situation des USA aujourd'hui est assez facile à voir. Les Américains interviennent en Afghanistan voire en Irak pour défendre les mêmes valeurs qu'en 1941. Un tel film sorti avant 2008 aurait pu être catalogué pro-administration républicaine, celle des Faucons au service de George Bush junior. Sorti en 2011, avec comme sujet l'origine de Captain America, c'est à la fois maintenir la continuité de la politique américaine tout en préférant l'approche démocrate du successeur de George Bush. Barack Obama n'a jamais remis en cause officiellement l'intervention américaine mais a réorienté ses motivations.


Conclusion
Les USA n'en ont donc pas fini de se raconter par des super-héros allégoriques. A chaque période clé, ce sont des cohortes de films revisitant leurs mythes comme autrefois les Grecs anciens se racontaient les aventures et tribulations de leurs dieux de l'Olympe et de leurs héros. Reste à voir, pour cette dernière version de Captain America si la morale du film accompagne bien la nouvelle orientation prise par le président Obama ou si  le film ne fait que, au mieux, raconter à nouveau et à force d'effets spéciaux les origines du héros américain, ou, au pire, si le film reprend ce qui parfois génère l'anti-américanisme, c'est-à-dire en présentant les USA comme impérialistes et supérieurs aux autres. Au regard du sujet et du résumé de présentation, on peut espérer que non.
A vous de juger mercredi 17 août 2011!

A bientôt

Lionel Lacour

mardi 21 juin 2011

Rocky et Rambo: deux héros américains

Bonjour à tous,

il y a quelques années, lors d'une formation pour des enseignants, l'un d'entre eux me demanda si pour moi, Rambo était une source historique. Cette interrogation provoqua de ma part une certaine consternation. En effet, qu'est-ce qu'une source historique? Est-elle liée à la qualité de l'oeuvre étudiée ou bien est-ce un témoignage de l'époque étudiée? Devrait-on éliminer certaines inscriptions latines ou grecques sous prétexte qu'il y aurait des fautes d'orthographe? Il en est donc de même pour les films dont la qualité cinématographique n'a rien à voir avec le témoignage historique qu'ils peuvent révéler de leur époque.
Au-delà de cet aspect sur la validité de "source" historique de Rambo, c'était bien le jugement esthétique qui m'ennuyait. En effet, Rambo est un film particulièrement intéressant cinématographiquement parlant comme nous allons le voir ci-dessous. Pourtant, il suffit de prononcer ce mot, RAMBO, pour provoquer sourires et moqueries sur le personnage. C'est que ce personnage n'est pas resté celui que nous découvrions dans le premier opus en 1982 réalisé par Ted Kotcheff. Il est devenu ce symbole du cinéma américain reaganien au fur et à mesure que les années 1980 avançaient jusqu'à la caricature. Il en fut de même pour Rocky, interprété par le même Sylvester Stallone qui devint à son tour une caricature après trois épisodes plutôt bien accueillis jusqu'en 1982 jusqu'à ce que le quatrième opus plonge Rocky en pleine guerre froide!

Stallone, Rocky et Rambo forment désormais une sorte d'unique personnage, à la fois réac, violent, manichéen, profondément américain sans aucune nuance. C'est oublier que ces personnages et les films qui les ont fait découvrir étaient autrement plus intéressants!

1. Rocky et Rambo: deux Américains des années 70
Quand Stallone présente son scénario, il s'impose également pour interpréter le rôle du personnage principal, Rocky Balboa. Réalisé par John G. Avildsen en 1976, Rocky n'est pas l'histoire d'un super héros ni d'un héros classique de western ou même des films de Peckinpah ou de Siegel. C'est un minable boxeur qui travaille à la solde d'une sorte de mafieux pour récupérer des créances. Les quartiers populaires de Philadelphie constituent le décor du film et c'est bien la misère sociale qui est présentée, avec ces Italiens qui vivent ensemble dans le même quartier, ces braseros autour desquels se réunissent les paumés le soir, ces jeunes désoeuvrés. Mais Rocky, c'est aussi un hymne à l'Amérique, celle qui rêve encore du Melting pot. C'est Rocky et Paulie qui, quoi qu'italiens, célèbrent Thanksgiving, c'est le champion du monde Apollo Creed, un noir, qui célèbre une bataille de la guerre d'indépendance américaine, Bunker Hill, quasiment constitutive de l'identité américaine, lui vraisemblablement l'ancien descendant d'esclave.
Quand Apollo propose à Rocky, par son agent, de combattre pour le titre, Rocky refuse non par peur, mais par honnêteté: il ne vaut pas Apollo et le combat serait mauvais. L'agent lui rappelle qu'aux USA, tout le monde peut avoir sa chance. C'est l'histoire du film. Saisir la chance qui est offerte. Peu importe la conclusion. Quand Rocky accepte le combat, il entraîne avec lui tout son monde, de son coach à son patron. Sa fiancée, la depuis fameuse Adrian, se métamorphose en accompagnant ce challenger. C'est comme si cette chance offerte a un individu profitait à toute une communauté et même au-delà. La séquence d'entraînement conduit Rocky a courir dans tout Philadelphie.

Et, suivi par les jeunes de la ville pour qui il devient une sorte d'espoir, Rocky grimpe les marches du Philadelphia Museum of Art, symbole de son ascension et de sa reconnaissance pour la chance qui lui a été offerte. Le combat importe alors très peu. Irréaliste, inspiré du combat entre Mohamed Ali et Chuck Wepner, il est resté célèbre pour sa conclusion, Rocky hurlant le prénom de sa fiancée tandis que le nom du vainqueur se fait presque de manière discrète. C'est que Rocky a justifié l'opportunité proposée. Il est allé au bout des 15 rounds du combat, malgré ses chutes au tapis, faisant tomber à son tour le champion. Sa défaite est anecdotique. La vraie victoire est celle gagnée sur lui même, lui qui n'était qu'un loser. Il a prouvé qu'il valait mieux que ses petits combats de clubs. Il est devenu quelqu'un malgré la défaite. Les deux suites sont globalement dans la même veine. Rocky II est le quasi remake du premier avec une victoire de Rocky à la fin. Rocky III, l'oeil du tigre est plus spectaculaire, offre davantage de combats aux spectateurs et continue à vanter les mérites du modèle américain. Si Clubber Lang veut défier Rocky qui annonce pourtant sa retraite, c'est pour les mêmes raisons qui ont permis à Rocky de devenir le champion: il veut sa chance. Vainqueur de Rocky, Clubber Lang a pourtant deux défauts majeurs pour être un bon américain: il est irrespectueux de tous ceux qui perdent, ce qui contredit donc le message du premier épisode, et il est, aussi étrange que cela puissa paraître, beaucoup trop individualiste. En effet, contrairement à l'image que nous pouvons nous faire de la société américaine, l'individualisme ne peut se concevoir que s'il y a une conséquence pour la communauté. Là encore, le message du film de 1976 était clair. Rocky devient quelqu'un parce que son combat individuel devient le combat de ses proches, de son quartier, de sa ville. La défaite de Clubber Lang est donc celle de l'individualisme égoïste.

En 1982, Stallone sortait un autre film qui allait le marquer définitivement. Rambo a cette caractéristique commune avec Rocky d'être de fait un loser. Vétéran du Vietnam, il est donc quelqu'un qui a perdu la guerre. Du point de vue cinématographique, le passé du personnage est donné par petites touches impressionnistes, par quelques flash backs le montrant torturé par un Vietnamien. Il faut néanmoins attendre la moitié du film, alors que la police de la ville croit l'avoir tué, pour que le fameux colonel Trautman révèle qui est Rambo, un militaire d'exception, ayant reçu les plus grandes décorations de l'armée américaine. Le film révèle plusieurs états d'esprit. Celle des Américains d'abord, que le traumatisme de la défaite au Vietnam conduit à rejeter tout ce qui peut y faire référence, à commencer par les vétérans. C'est ce qui conduit le shérif à chasser Rambo de sa ville alors même qu'il n'a commis aucun délit. C'est aussi l'état d'esprit des vétérans qui se sentent rejeter par leur pays et ses habitants qui n'ont pas conscience du traumatisme de la guerre menée en Asie du Sud Est et des horreurs qui y ont été perpétrées par les deux camps. Etat d'esprit enfin d'une armée qui a été incapable de s'occuper de ses vétérans qui étaient partis pour la plupart très jeunes dans ce conflit.
La séquence finale est de ce point de vue très intéressante. Barricadé dans le bureau du shérif après avoir détruit la moitié de la ville Rambo se trouve face au colonel. Il explique alors ses états d'âme: insulté par les civils, ne trouvant pas de boulot, traité d'assassin et de bourreau, Rambo ne comprend pas ce mépris de la part de ces Américains car il n'a fait que ce que l'armée et donc son pays lui ont demandé de faire. Il témoigne de la manière dont un gamin vietnamien a fait sauter une bombe, se tuant et avec lui un soldat américain, montrant à quel point les Américains ne pouvaient pas lutter contre un peuple prêt à envoyer ses enfants mourir pour repousser les Américains. C'est enfin la désocialisation des vétérans que Rambo exprime à son colonel. De manière hallucinante, Rambo pleure alors et se réfugie dans les bras du colonel. Un enfant dans les bras de son père.
Le film est filmé comme la guerre du Vietnam s'est déroulée: un incident anodin sur un homme surpuissant qui va alors tout détruire, et comme la pente savonneuse sur laquelle avait glissé les USA au Vietnam, Rambo ne pourra plus faire machine arrière sinon à détruire tout sur son passage tout en sachant qu'il finira par perdre. Rambo est l'allégorie des USA: surpuissant, sa musculature ici n'est pas inutile pour le propos du film, mais un colosse finalement fragile. Le héros du film finit donc menotté. Fin étrange donc pour un film américain avec un happy end dans le sens où Rambo a détruit toute une ville, tué un homme et s'est rebellé contre la police. Mais la morale du film montre bien que Rambo est une victime et qu'il paie pour ceux qui l'ont abandonné: l'Etat, l'armée, les civils.

2. Rocky et Rambo: des héros reaganiens?
Qu'est-il donc arrivé à ces deux personnages pour qu'ils deviennent à ce point des porte-drapeaux des USA dans leur combat contre le bloc soviétique?
Celui qui tardera le plus à entrer dans ce conflit est Rocky. Dans le quatrième épisode, réalisé en 1985 par Sylvester Stallone (comme les deux précédents épisodes d'ailleurs), l'URSS est représentée sous deux formes. Une habituelle de l'apparail étatique, et l'autre, sous la forme de l'homo sovieticus en la personne d'un boxeur nommé Ivan Drago. C'est l'opposition entre le monde professionnel de la boxe des USA et celui amateur, mais bien sûr soutenu par l'Etat, de l'URSS.
Quand Apollo veut rencontrer Drago dans un combat alors qu'il est à la retraite depuis plusieurs années, c'est pour des raisons purement idéologiques que réfute Rocky. Mais Drago gagne ce combat exhibition et tue Apollo. Rocky accepte le combat contre Drago en mémoire de son ami. Le combat aura lieu en Russie. L'entraînement des deux boxeurs est une des parties les plus intéressantes du film, qui globalement est assez mauvais. Mais du point de vue de la représentation des deux modèles idéologiques, Stallone oppose bien deux conceptions. Celle américaine fait de Rocky un personnage qui s'entraîne en harmonie avec la nature, courant en montagne, aidant les personnes dans le besoin, le tout surveillé par les KGB. On a même droit à une ascension comme celle de Philadelphie, mais cette fois-ci au sommer d'une montagne vertigineuse. De son côté, Drago devient cet homme machine dont tous les progrès sont mesurés électroniquement. Aucune part pour la liberté, pour la fantaisie. Tout est encadré par le régime, sur fond de couleur rouge, bien entendu!
Quand le combat commence, tout est devenu prétexte à un combat USA vs URSS puisque chaque boxeur porte un short aux couleurs de son pays. Rocky, 30 cm au moins plus petit que son adversaire fait mieux que résister. Il est même soutenu par le public russe devant son courage. Un dignitaire soviétique vient alors sermoner Drago qui ferait honte à l'URSS. Celui-ci affrime alors à tous ceux qui veulent l'entendre qu'il combat pour son compte! En une phrase, le combat vient définitivement de trouver son vainqueur: c'est les USA! En effet, l'entraînement démontrait qu'en aucun cas il n'était préparé pour un combat "pour son compte" puisque ses performances étaient scrutées par un staff soviétique. En devenant un boxeur "indépendant", il s'approprie alors les valeurs américaines, celles de l'individu qui prime sur l'Etat.
Rocky triomphe cependant de Drago, soutneu lui par tout un peuple, de sa femme et son fils à tous les USA. Dans son discours d'après combat, Stallone fait alors dire à son personnage quelque chose d'assez stupéfiant pour 1985: deux hommes qui s'entretuent, "c'est quand même mieux que 20 millions". Et de rajouter après s'être rendu compte que le public avait changé d'attitude à son égard pendant le combat, que "si lui avait changé, et que [eux] avaient changé, tout lemonde peut arriver à changer!"
Cette réplique est alors salué par le dirigeant soviétique, sosie de Gorbatchev. Cette perception d'un changement à la tête de l'URSS est assez impressionnante pour un film de cette catégorie. En effet, Gorbatchev arrive au pouvoir en mars 1985 alors que le tournage du film commence en avril et se finit en juillet de cette même année. On peut imaginer que le scénario de Stallone a pu s'adapter à la personnalité de ce nouveau dirigeant. Cependant, Gorbatchev n'avait pas encore entamé ni la Perestroika ni la Glasnost. Ainsi, Rocky IV est bien sûr un film pro-américain mais il est aussi un film qui comprend que quelque chose bouge du point de vue politique en URSS pouvant avoir des conséquences dans les relations entre les deux blocs.

Cette approche plutôt positive du régime soviétique contraste avec Rambo II, la mission, sorti en mai 1985 aux USA, et donc réalisé à la fin du "règne" Tchernenko et avant l'arrivée au pouvoir du "jeune" Gorbatchev. En effet, alors que Rambo se voit confier une mission par le colonel Trautman pour aller récupérer des prisonniers américains encore captifs au Vietnam, le spectateur découvre, que ce pays asiatique est en fait largement sous influence de l'URSS qui envoie des officiers dans ce pays. Le combat mené par Rambo est donc autant contre les Vietnamiens que contre les Soviétiques et donc contre le communisme en général. Cette mission a aussi un vertu en pleine période reaganienne. Elle montre que la volonté américaine permet de faire triompher les valeurs des USA.

Quand Rambo est laché par les administratifs de la CIA, l'abandonnant lui et les prisonniers qu'il a libérés, c'est en quelques sorte toute l'administration américaine des années 1960 et 1970 qui est dénoncée, celle qui renonce devant l'ennemi, celle qui sous le gouvernement Carter avait laissé des Américains prisonniers dans leur ambassade à Téhéran sans réellement intervenir. Rambo réussit à ramener les soldats au camp américain puis s'en prend à celui qui l'a trahi, lui signifiant que désormais, il faudra libérer les autres prisonniers au risque de retrouver Rambo sur son chemin. Cette séquence spectaculaire et acclamée dans chaque salle de cinéma américaine trouve son écho dans la réponse de Rambo à son colonel: "je veux que mon pays nous aime autant que nous nous l'aimons." Ainsi le traumatisme post-Vietnam n'a pas encore tout à fait disparu, même en 1985. Si le film est très manichéen, dénonçant la barbarie communiste, Rambo II est un film surtout patriotique, ce qui explique son succès au Box office.

Il en est autrement pour le troisième volet Rambo. En 1988, Peter Mc Donald réalise Rambo III, plaçant l'action en Afghanistan. Or Rambo vit désormais en Thaïlande, loin des USA et du souvenir de la guerre. Pourtant, il sera impliqué dans une intervention en Afghanistan pour sauver le colonel Trautman, parti aider clandestinement des moudjahidins qui combattent contre l'occupant soviétique, présent dans le pays depuis 1979. Ouvertement anti-soviétique, le film montre le "Vietnam soviétique" dans lequel les Américains ont, cette fois-ci, le rôle du libérateur. Le colonel soviétique est montré comme un tortionnaire sanguinaire, usant de l'arme chimique pour combattre les rebelles afghans. A la sauvagerie du Soviétique répond l'invulnérabilité de Rambo, aguerri au combat depuis son passage au Vietnam. Trautman prisonnier a foi en Rambo ce qui donne un échange entre lui et son geôlier, le colonel Zaysen:
[en parlant de Rambo] "Pour qui le prenez-vous, Dieu?"
"Non, Dieu aurait pitié!"
Rambo est donc une machine de guerre prête à tout pour sauver "Son" colonel. Impitoyable avec les ennemis, il vient également aider les Afghans dans leur combat. Dans une scène surréaliste, les chefs de guerre moudjahidins lui expliquent leur combat et ce qu'ils veulent défendre. Parmi ces chefs se trouve un certain commandant Massoud! Le film date de 1988, soit 13 ans avant que ce personnage ne soit abattu par les talibans. Surtout, Massoud n'était vraiement connu que des spécialistes de la guerre en Afghanistan. Ce détail montre combien ces films, même manichéens, même particulièrement douteux tant du point de vue idéologique que cinématographique, sont particulièrement documentés pour renforcer la crédibilité de ce qui peut l'être. Que Rambo aille ensuite plus vite à cheval que les hélicoptères qui le poursuive relève pour les spectateurs des exagérations des films d'action de ce genre.
Ce qui est plus curieux est bien que le discours soit aussi virulent contre le soviétique alors même que, nous l'avons vu, Rocky IV montrait une inflexion favorable vis-à-vis de Gorbatchev. On peut alors voir que celui qui est dénoncé est un homme, le colonel Zaysen, plus que l'URSS. Une sorte de personnage qui aurait outrepassé ses prérogatives de militaires. L'URSS n'est donc pas épargnée au sens où c'est sa présence en Afghanistan qui a permis à Zaysen d'être le bourreau des Afghans. Mais l'URSS, et avec elle son dirigeant principal, est dépassé par ces chefs locaux. En ce sens, Rambo III annonce déjà la fin du contrôle de l'URSS sur ses armées et donc son affaiblissement.
Reagan pouvait alors dire en 1985 qu'il saurait quoi faire la procahine fois que des Américains seraient faits prisonniers après avoir vu Rambo II, il fit, lui et son administration, la même analyse que les scénaristes de Rocky IV et de Rambo III: l'URSS était plus vulnérable que jamais avec à sa tête un dirigeant prêt à un rapprochement avec le bloc de l'Ouest. Il fallait donc jouer sur cette situation pour déstabiliser davantage l'URSS et par là même, le bloc de l'Est tout entier.



Pour conclure, les séries des "Rocky" et "Rambo" s'est quasiment éteinte dans les années 1990. Bien sûr le personnage de Rocky n'était plus crédible en boxeur si bien que Rocky V transforma en 1990"l'étalon italien" Rocky en coach, proposant un film plus dans la lignée du premier opus,la fraîcheur en moins. Rocky VI autrement appelé Rocky Balboa ne fit pas que donner un nom à son héros sur l'affiche. Le film de 2006 semble boucler une boucle entamée trente ans auparavant. A la fois nostalgique avec une séquence de générique de fin montrant tous ceux gravissant les mêmes marches que Rocky à Philadelphie, le film semble vouloir sortir le personnage de Rocky de la caricature dans laquelle il était entré avec Rocky IV. John Rambo, sorti en 2008, relève de la même logique que Rocky Balboa. Nostalgie et plaisir de retrouver un personnage entré dans la culture mondiale mais volonté aussi d'en faire un héros moins manichéen dans un film plus personnel. Là n'est pas la question de la réussite de ces films. Ce qui est sûr, c'est que Stallone aura été un de ces rares acteurs à être confondu, associé et assimilé avec le nom d'un héros qu'il a interprété. Stallone aura été assimilé à deux héros américains collés à tout jamais aux années Reagan, sans pouvoir depuis vraiment s'en dissocier.


A bientôt

Lionel Lacour