Bonjour à tous,
Comme chaque année depuis 2009, année du premier prix
Lumière qui récompensa Clint Eastwood du prestigieux prix, le jeu des
pronostics allait bon train chez tous les cinéphiles. En off, sur les réseaux
sociaux, entre amis, chacun y allait de son podium des lauréats potentiels.
Comme depuis la première édition il n’y eut jamais deux fois un récipiendaire
issu du même continent, il semblait acquis que celui de 2017 ne pourrait être
européen. Américain alors ? Pourquoi pas. Mais il y avait un
continent qui n’avait pas encore été récompensé malgré une cinématographie
reconnue internationalement et de plus en plus influente sur les autres
territoires cinéphiles : l’Asie.
Or, si la liste des cinéastes asiatiques est longue, faut-il
encore que le réalisateur récompensé réponde à plusieurs des critères qui
caractérisent les lauréats du Prix Lumière : importance de l’œuvre,
notoriété, influence en dehors de ses frontières. Tous les lauréats y
répondaient avec plus ou moins d’intensité. Il fallait donc que celui venant
d’Asie en fasse tout autant.
Et Wong Kar Wai surgit sur l’écran de l’Institut Lumière
Ce jeudi 15 juin 2017 fut donc révélé peu avant midi le nom
du cinéaste primé. Comme d’habitude, c’est par un jeu de piste imagé que les
participants à la conférence de presse annonçant l’essentiel de la
programmation du Festival Lumière ont pu voir apparaître quelques images des
films du cinéaste. Les plus cinéphiles le reconnurent très vite. D’autres
mirent quelques secondes. Et puis tout fut limpide avec les quelques mesures de
la bande originale de In the mood for
love. C’était lui. Wong Kar Wai s’écrivit en toutes lettres sur le grand
écran, sous les hourras des spectateurs qui applaudissaient avec enthousiasme.
Wong Kar Wai. Quel autre cinéaste asiatique pouvait mieux que lui répondre aux
critères susmentionnés. Bien sûr, d’autres réalisateurs chinois, coréens ou
japonais peuvent plaire davantage à des cinéphiles. Mais qui peut prétendre
voir un de ses films reconnu par le plus grand nombre par une seule mesure de
musique ? Qui a exploré des genres aussi variés tout en construisant un
univers et un style aussi identifiable ?
Ainsi, avec Wong Kar Wai, Thierry Frémaux, le directeur du
Festival Lumière, ne réparait pas une injustice mais complétait le tableau des
lauréats en intégrant dans le panthéon des artistes de cinéma un artiste venu
d’un continent éminemment cinéphile. Mais plus que d’ouvrir le festival à
l’Asie, la conséquence d’un tel choix ne manquera pas de venir. Que le Festival
du Cinéma Classique se tenant dans la ville où est né le cinéma honore un
artiste hongkongais, donc chinois, cela ne peut pas avoir des répercussions
internationales favorables au Festival Lumière. La puissance du continent
asiatique, la volonté de la Chine à être de plus en plus reconnue comme une
puissance à part entière, y compris dans le domaine artistique verront dans ce
prix une opportunité de s’ouvrir davantage encore. Le Soft power fut théorisé en son temps par les USA comme le moyen de
dominer et influencer des territoires non par des armes mais par « The American way of life »,
comprenant le blue jean, le chewing gum, le coca-cola et bien sûr le cinéma.
Wong Kar Wai prix Lumière devient l’équivalent de Eastwood, Tarantino ou
Scorcese, cinéastes américains récompensés du même prix.
Clip Prix Lumière 2017:
Par effet collatéral, c’est bien le Festival Lumière et avec
lui, l’Institut Lumière qui pourraient bien aussi profiter à terme de ce choix
artistique qui ne souffre d’aucune contestation possible. Si les premiers films
Lumière avaient déjà investi le continent asiatique, en Indochine, en Chine ou
au Japon, comme le film documentaire Lumière,
le cinéma inventé le montre, le choix de récompenser plus de 120 ans après
l’invention du cinématographe un réalisateur asiatique pourrait bien rouvrir
les portes du continent au nom Lumière. Mais cette fois-ci pas comme le firent
les inventeurs du cinéma, en filmant le continent pour en montrer le caractère
exotique à une Europe coloniale, mais en universalisant le cinéma sur tous les
espaces de la planète, y compris donc l’asiatique, pour en révéler les trésors,
parfois oubliés, parfois à restaurer, en les projetant aux spectateurs dans les
salles de cinéma.
À la première édition du Festival Lumière, l’ambition
affichée de son directeur était de faire du Prix Lumière l’équivalent du
« Prix Nobel de Cinéma ». Cette ambition peut être définitivement atteinte car, en
primant Wong Kar Wai,, Lumière peut passer de « nom des inventeurs du
cinématographe » à « Label universel du patrimoine
cinématographique ».
Le reste de la programmation est à retrouver sur www.festival-lumiere.org avec
notamment des rétrospectives Henri-Georges Clouzot et Jean-Luc Godard, un festival Lumière enfant – et une
désormais attendue projection du Roi
Lion ! – un panorama du western classique par Bertrand Tavernier, un
focus sur la cinéaste lyonnaise Diane Kurys, une invitation au cinéaste mexicain Guillermo del Toro et bien sûr d’autres thèmes à
découvrir très vite.
04 78 78 18 95
À très bientôt
Lionel Lacour
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire