vendredi 3 octobre 2014

Festival Lumière 2014 - "L'indésirable" d'un certain Mihály Kertész

Bonjour à tous,

le festival Lumière permet de montrer tous les cinémas, y compris le cinéma muet. En choisissant de projeter L'indésirable (traduit parfois également par L'expulsion - A tolonc étant le titre original) réalisé en 1914, les organisateurs réalisent une sorte de billard à trois coups.

Tout d'abord, cela permet de comprendre que le cinématographe s'est propagé dans le monde entier, y compris dans des territoires européens reculés comme la Hongrie de l'empire des Habsbourg.
Ensuite, cela montre que la production cinématographique a généré rapidement des talents européens et pas seulement français.
Cela montre encore que le cinéma sous sa forme artistique, avec une grammaire spécifique, et contrairement à ce que certains disent parfois, n'est pas né avec Griffith, De Mille ou avec les réalisateurs soviétiques. À la veille de la Première guerre mondiale, c'est bien dans le pays Magyar que fut réalisé L'indésirable.
Enfin, cela permet de réaliser aussi que bien des talents hollywoodiens sont nés et surtout avaient déjà tourné dans un autre pays que les États-Unis. Comme bien d'autres réalisateurs européens, Mihály Kertész fut attiré par les grands studios américains autant qu'il dut d'abord quitter sa terre natale pour l'Autriche puis l'Allemagne après des mouvements antisémites et anti-communistes qui sévissaient en Hongrie. Il allait devenir Michael Curtiz, le réalisateur des mythiques Les aventures de Robin des Bois, Casablanca, L'Égyptien ou Les comancheros.
Pour en savoir plus sur les origines de Michael Curtiz, vous pouvez consulter la page du Festival Lumière qui lui est consacrée: Festival Lumière - Michael Curtiz période hongroise


Mais en 1914, il n'est encore que Mihály Kertész, juif hongrois, un des fondateurs du cinéma de son pays.  Pour son 10ème film - un des nombreux qu'il a réalisés en 1914! - le jeune Mihály plonge les spectateurs dans un drame rural qui permet de bien comprendre que les spectateurs hongrois étaient avant tout issu de la paysannerie et que le monde urbain était encore bien réduit, ou bien était constitué d'habitants ayant quitté leur campagne pour trouver du travail en ville.
Le talent de Curtiz est déjà présent à l'écran. Tout d'abord, sa formation de comédien de théâtre lui permet de mettre en scène ses acteurs en valorisant leur travail. C'est ensuite dans sa capacité à mettre en avant les détails du quotidien, le travail des plus modestes que le cinéma de Mihály Kertész se distingue. Sa lecture sociale des relations entre les différents individus qui peuplent ses films, y compris dans les nombreux films d'aventure réalisés notamment avec Errol Flynn et Olivia de Havilland, est déjà dans L'indésirable.
C'est enfin une occasion rare que de voir ce que les spectateurs hongrois acceptaient de voir au cinéma dans un film dans lequel ils pouvaient projeter leur société sur grand écran.

Cette rareté du cinéma hongrois est donc une pépite présentée au Festival Lumière qui permet de mieux comprendre comment des réalisateurs des origines du cinéma ont pu faire leur gamme en tournant beaucoup, en osant faire ce qui n'avait jamais été fait avant eux, en apportant leur culture souvent littéraire ou théâtrale dans cet art nouveau dont il fallait inventer puis développer le langage. Mais surtout, ce film, réalisé par celui qui devint plus tard un maître d'Hollywood et du studio de la Warner avec qui il travailla tant, constitue un témoignage fantastique d'une œuvre qui allait ensuite s'étaler jusqu'à la mort du réalisateur en 1962 et sur 172 films dont quelques chef-d'œuvres du 7ème art.

VENDREDI 17 OCTOBRE 11h30 - 6 € / 5 € accrédités
L'indésirable, Mihály Kertész, 1914, 1h08
Réservations par téléphone au 04 78 78 18 95
ou sur www.festival-lumiere.org

À très bientôt
Lionel Lacour







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